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Giroud, l’homme de la situation

Il y a dix jours, le Milan annonçait officiellement le recrutement d’Olivier Giroud. En mal de temps de jeu à Chelsea et au sortir d’un Euro qui s’est terminé plus tôt que prévu pour son équipe, le Français débarque donc en Lombardie dans le but de se relancer avant la Coupe du Monde 2022, le dernier gros défi de sa carrière internationale. Sa signature avec le club rossonero n’a pas forcément enthousiasmé la masse des tifosi, qui attendaient très probablement une recrue plus jeune et clinquante. Souvent raillé et toujours mal considéré pour des raisons plus ou moins valables, le natif de Chambéry n’est pourtant pas le premier venu, loin de là. La direction sportive du Milan ne s’est certainement pas trompée en misant sur Olivier Giroud, un joueur ayant su se faire sa place partout où il est passé malgré un statut qui n’a jamais été celui d’une star.

Numéro 2, vraiment ?

Les réactions suite à l’annonce de l’arrivée de Giroud au Milan n’ont pas tardé à faire rimer son nom avec ‘banc des remplaçants’. Son expérience récente de dernier choix dans la hiérarchie des attaquants de Chelsea établie par l’entraîneur Thomas Tuchel ainsi que son temps de jeu famélique avec l’équipe de France à l’Euro suite au retour en Bleu de Karim Benzema n’ont en effet pas favorisé sa cause. Sans compter que lorsque l’on se tourne vers l’effectif rossonero, on constate qu’un élément majeur occupe le devant de la scène sur le poste favori de Giroud… Peut-on dès lors considérer qu’il est pertinent de chercher du temps de jeu dans un club où l’attaquant axial titulaire n’est autre que Zlatan Ibrahimović ? A première vue, pas vraiment.

Quand on y regarde de plus près, le Suédois n’est pas si intouchable que ça. A ce titre, les chiffres de l’exercice 2020-2021 sont d’ailleurs éloquents : le Suédois a disputé 27 matches toutes compétitions confondues et en a raté pas moins de 24 pour raisons de santé ! La saison dernière, le Milan a donc joué quasiment un match sur deux sans son attaquant de pointe titulaire, garant de l’état d’esprit du vestiaire et de la compétitivité de l’équipe. Plus que jamais, à presque 40 ans (qu’il fêtera en octobre prochain), Ibrahimović n’est plus la machine increvable qui ne cessait jamais de jouer et semble donc bien avoir l’âge de ses artères. En outre, les solutions de rechange à disposition du Mister Pioli n’ont pas donné satisfaction : Rafael Leão confirme être tout sauf un joueur d’axe, Ante Rebić n’a aucune prédisposition pour le poste et Mario Mandžukić a été un flop retentissant.

C’est là que le recrutement de Giroud peut conduire à rebattre les cartes. Le Français ne sort pas d’une pré-retraite au Qatar, bien qu’il n’ait pas eu un temps de jeu conséquent chez les Blues (31 matches toutes compétitions confondues dont 12 titularisations, pour un total de 1200 minutes de jeu). Il a tout de même joué à un niveau plus que compétitif, entre la Premier League, la Champions League – remportée par Chelsea – et ses sélections en équipe de France, notamment en Nations League (face à la Suède, la Croatie et le Portugal). Giroud n’arrivera donc pas hors de forme et complètement étranger au haut niveau dans une équipe qui manque toujours cruellement d’expérience. D’autant plus qu’à l’heure actuelle, la date du retour à la compétition d’Ibrahimović n’est pas connue : l’ex joueur de Chelsea peut donc très vite se retrouver dans la peau d’un titulaire au lancement de la saison du Milan, qui sera primordial pour retrouver une nouvelle fois le top 4 de la Serie A en mai 2022. De quoi brouiller de manière effective la frontière entre numéro 1 et numéro 2…

L’art de se faire sa place

Contrairement à son coéquipier suédois et aux stars du football actuel, le parcours d’Olivier Giroud n’a rien de linéaire. Le Français formé au GF38 n’a jamais fréquenté les équipes de France jeunes et s’est découvert au haut niveau relativement tard après avoir écumé les pelouses de Ligue 2 avec Grenoble, Istres et Tours (chez qui il est élu meilleur joueur de deuxième division lors de la saison 2009-2010). C’est à l’occasion de l’exercice 2011-2012 que le grand public fait connaissance avec le buteur Giroud lors de l’improbable titre de champion de France remporté par Montpellier, à l’an I du PSG à la sauce Qatar. Ses 21 réalisations en championnat (plus haut total cette année-là) lui ouvrent les portes de l’équipe de France et lui permettent de rejoindre l’attractive Premier League du côté d’Arsenal. A Londres, il endosse immédiatement le costume de titulaire avec pour tâche de faire oublier Robin Van Persie, parti à Manchester United. Une première saison dans un club du haut de tableau à 26 ans finalement positive, qui se conclura avec 17 buts et 12 passes décisives en 46 rencontres toutes compétitions confondues. Rebelote la saison suivante, avec 22 réalisations et 12 assists en 51 matches, alors qu’Arsenal joue le titre pendant 30 journées, puis 19 buts lors de l’exercice 2014-2015 qu’il a manqué en partie suite à une fracture au pied et encore 24 pions l’année d’après.

2016 marque le début de la fin entre Arsenal et Giroud, face à la concurrence d’Alexis Sanchez et d’Alexandre Lacazette. Mais cet exercice n’entame en rien le bilan comptable du numéro 12 des Gunners : à 30 ans, alors qu’il n’est titulaire qu’à 17 reprises sur les 40 matches qu’il dispute, Giroud inscrit tout de même 16 buts et délivre 7 passes décisives. Finalement et malgré un apport indéniable dans ce rôle de doublure, Arsenal le pousse vers la sortie à l’occasion du mercato de janvier 2018, où il rejoint Chelsea après avoir marqué 105 buts en 253 matches sous le maillot rouge et blanc. Sa meilleure phase chez les Blues arrive à l’occasion de la saison 2018-2019, sous les ordres de Maurizio Sarri, où il montre une nouvelle fois qu’il utilise avec efficacité le temps de jeu qu’on daigne lui accorder. Il est titulaire lors de la campagne européenne qui permet à Chelsea de remporter l’Europa League (face à Arsenal), trophée dont il est l’artisan majeur avec 11 buts et 4 passes décisives en 14 rencontres.

Dans le même registre, alors qu’il est cantonné au banc avec l’arrivée de Frank Lampard à la tête du club du cossu quartier londonien, Giroud retrouve son efficacité lors de la reprise de la Premier League post Covid, en inscrivant 6 buts en 9 journées. Même chose la saison dernière, cette fois-ci en Champions League, avec un quadruplé sur la pelouse du Séville FC et le but de la victoire sur la pelouse de l’Atlético de Madrid en huitième de finale aller. La nomination de Thomas Tuchel en cours d’exercice entame profondément son temps de jeu, l’Allemand misant bien volontiers sur son compatriote Timo Werner, qui n’a pourtant marqué qu’un but de plus que le Français (12 contre 11) en ayant joué 21 matches de plus (52 contre 31) ! C’est sans conteste le principal point fort de Giroud : peu importe les circonstances, son importante confiance en lui et son mental à toute épreuve lui permettent d’avancer toujours et encore… un peu comme Ibrahimović, finalement.

Le Piolismo, tout pour lui plaire

Il y a peut-être bien un heureux dans cette affaire, c’est Stefano Pioli. En recrutant Giroud, le Milan s’est offert à moindre coût les services d’une sorte de petite copie d’Ibrahimović. Aussi bien en termes de mensurations (1m93 et 91kg contre 1m95 et 95kg), de profil (point de fixation de type pivot pour faire jouer les coéquipiers, adroit balle au pied, qualité de frappe certaine) que d’expérience, le Français et le Suédois ont beaucoup de choses en commun. La bonne phase du club rossonero depuis juin 2020 et la reprise de la Serie A suite au tout premier confinement s’est faite sur le passage au 4-2-3-1, après des années d’un 4-3-3 insipide qui ne correspondait jamais à l’effectif à disposition de l’entraîneur d’alors. Ce système mis en place par le Mister Pioli a trouvé comme point de référence un Ibrahimović finalement irremplaçable et unique dans ce rôle au sein du groupe professionnel rossonero, jusqu’à aujourd’hui.

Les absences du Suédois ont mis en exergue une des limites de Pioli, qui ne sait pas faire jouer son équipe autrement que par son schéma favori du 4-2-3-1. Malgré l’absence d’un véritable joueur d’axe lorsque le natif de Malmö n’était pas disponible, le Mister persistait dans l’utilisation de ce système. Dorénavant, il a dans sa manche la carte Giroud – ce remplaçant qui n’en est pas vraiment un – à même de permettre à l’équipe de ne pas se reposer sur l’absence d’Ibrahimović pour justifier une contre-performance potentielle. Dans l’autre sens, c’est aussi un système que le Français connaît particulièrement bien et qui met en exergue ses qualités. Le sélectionneur de l’équipe de France Didier Deschamps l’utilise en effet depuis la saison 2014-2015, période où Giroud s’est installé comme le titulaire au poste de numéro 9 en équipe nationale.

Mais tout dépendra aussi de ses coéquipiers. La réussite de Giroud à ce poste et dans ce schéma a été symbolisée par la Coupe du Monde 2018, remportée par la France. A l’heure où les statistiques sont la première (et seule ?) grille de lecture quant à l’appréciation des performances d’un joueur, le fait que l’ex joueur de Chelsea n’ait pas marqué lors de la compétition lui a valu nombre de moqueries. Pourtant, c’est justement l’utilisation d’un profil comme le sien qui a permis de sublimer le jeu de Kylian Mbappé et Antoine Griezmann sur la route du titre. A l’heure actuelle, à Milan, Giroud combinerait avec Rebić, Díaz et Saelemaekers, probablement insuffisant pour atteindre une nouvelle fois une des quatre premières places de Serie A et pour ne pas faire mauvaise figure pour le retour du club rossonero en Champions League. Avec le Français, la direction sportive a réglé un des problèmes du Milan en s’assurant un joueur expérimenté, régulier et compétiteur mais les chantiers principaux sont toujours ouverts à l’heure actuelle. Le duo Ibrahimović/Giroud ne suffira pas.

Crédit photo : acmilan.com

  • Matmax22

    Premier match, premier but… je le sens bien Gigi moi au Milan.

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