Après des années de disette, marquée par des « mercati » sous le signe de l’achat low cost et du prêt avec option d’achat payable en cinq fois sur 10 ans, le Milan se montre de nouveau très actif sur le marché des transferts grâce au prochain accord avec Mr. Bee. Nouveaux investisseurs, nouvelles liquidités. Et tandis que le Milan devrait connaître un tout nouveau visage début septembre, un nom, qui circule un peu de partout, nous replonge dans le passé et dans la dernière période faste du Milan: Zlatan Ibrahimovic.
Berlusconi en rêve et veut faire de lui le grand coup qui marquerait le retour du Milan au premier plan, « son » Milan. Mais « l’amour est aveugle » selon l’adage, peut-être ne voit-il que le joueur n’est plus le même qu’a son départ il y à de cela trois saisons. En outre, peut être que sa volonté de frapper un grand coup durant ce mercato prend le pas sur la notion de projet évoqué par le président lui même.
Si l’homme a laissé une empreinte contrastée dans le paysage Rossonero, le joueur, lui est l’un des derniers attaquants du club a avoir brillé et imposé le respect sur les terrains Italiens. Acteur majeur du dernier titre Rossonero (14 buts et 13 passes décisives en 29 rencontres), il avait également brillé lors de sa dernière saison sous nos couleurs, terminant meilleur buteur du championnat avec 28 réalisations (et 8 passes décisives) en seulement 32 rencontres disputés !
Le retour d’un joueur ayant été l’un des artisans des derniers titres du Milan est un symbole pour le club. Un symbole, au-delà des futures performances du joueur, d’un Milan « retrouvé ». Un Milan qui n’achète plus parce qu’il « peut », mais parce qu’il « veut ». Le Milan se re-donne les moyens d’aller où il le souhaite, de se choisir un chemin, un projet, loin des contraintes restrictives de la loi du marché. Le Milan, cette calculette calculatoire que nous connaissons depuis 3 années, re-devient un « club » au sens propre du terme, une société de réflexion politique et non plus de calcul hors-sol. Le malade reprend alors des couleurs : le cadavre du Milan bouge encore.
Toutefois, si cet achat marquerait sans nul doute le retour au premier plan du septuple champion d’Europe, des questions demeurent quand a la pertinence même de cet achat. En effet, si le talent du Suédois reste indiscutable, son âge, son salaire ou sa dernière saison délicate avec le club Parisien peuvent poser question, notamment avec cette notion de projet de reconstruction du club. C’est ce que nous allons voir si dessous, en mettant en lumière les différents arguments légitimant son retour, mais aussi les freins éventuels pouvant faire douter les plus sceptiques.
Un véritable leader ou un caractère ingérable ?
Zlatan Ibrahimovic est assurément le genre de joueur qui ne laisse pas indifférent sur le terrain, le genre de joueur que l’on remarque. En achetant « Ibra », le club achète non seulement un top player, mais aussi une gueule connu de tous, un leader naturel qui fait peur a la défense adverse rien que par sa présence et sa forte carrure. Avec sa venue, le club pourrait ainsi compter sur un homme capable de bousculer les troupes, de les sortir de leur cocon doré où ils sont enfermés malgré deux saisons médiocres. A l’image d’un De Jong, Ibrahimovic serait l’un des rares joueurs capable de lever la voix et de pester ouvertement sur le terrain sans être contesté par ses coéquipiers.
Toutefois, la frontière entre un leader capable de motiver les troupes et un caractériel capable uniquement de les apeurer est mince, très mince. Si tous les joueurs l’ayant côtoyé reconnaissent aisément l’aura que dégage cette homme, certains n’ont pas hésité a déclarer qu’il était parfois difficile, déstabilisant de jouer au coté d’un joueur qui se montre souvent colérique et peu aimable envers ses partenaires. En outre, le caractère du joueur contraste quelque peu avec l’image (certes bafouée depuis quelques années) de l’institution AC Milan. Là ou le club souhaite avoir des professionnels exemplaires, classe, respectueux du club et des valeurs qu’il transmet, le comportement du Suédois va quelque peu a l’encontre de celui ci. Caractériel a souhait, il est fréquent de voir le géant des Balkans sortir de ses gonds et prendre des matchs de suspensions pour des attitudes contestables. Ainsi, à l’heure d’un retour au premier plan du club Rossonero, la question de la pertinence de la venue d’un joueur – certes excellent – au comportement sanguin peut se poser.
Volonté rapide de retrouver l’Europe ou vision a court terme ?
S’il y a bien une qualité que l’on ne peut reprocher à Zlatan Ibrahimovic, c’est le fait d’être décisif et déterminant pour l’équipe. Se muant en buteur ou passeur selon la nécessité, ce joueur serait un atout considérable dès l’an prochain dans la conquête d’un retour rapide en Europe (voir d’un retour en Ligue des Champions ?). En effet, cela fait près de 10 ans (depuis la saison 2006/2007) que le géant Suédois marque au minimum 14 buts en championnat chaque saison. Depuis le début de sa carrière, le joueur aura marqué 122 buts en Serie A (en 219 rencontres), 16 buts en Liga (en 29 rencontres) ou encore 75 buts en Ligue 1 (en 91 rencontres). Impressionnant. De fait, l’impact du joueur est indiscutable et il est évident que la venue du joueur nous ferait gagner de nombreux points tant Zlatan est le genre d’attaquant capable de faire gagner un match a lui tout seul, capable de marquer le but de la victoire lors d’une rencontre bloquée pendant 90 minutes.
Toutefois, si son apport est indiscutable dans l’optique d’un retour sur la scène Européenne, les prestations du Suédois sur celles-ci demeurent bien en deçà de son niveau. S’il a tout de même marqué 42 buts (en 107 matchs) en Ligue des champions depuis le début de sa carrière, son incapacité chronique a briller a partir des huitième de finale (7 petits buts inscrits en onze ans de carrière) est un frein évident. Ainsi, si recruter un joueur capable de nous amener en Ligue des Champions peut s’avérer pertinent, recruter un joueur dont on connait l’inefficacité dans cette compétition l’est beaucoup moins. Son achat ressemble donc davantage a une envie farouche de rejoindre a tout prix et au plus vite la Ligue des Champions et ce sans prendre en considération la pertinence de l’achat, le projet de reconstruction du club.
En outre, nous connaissons tous les bénéfices que pourraient apporter le Suédois sur le terrain, mais nous en connaissons aussi les inconvénients. Ce que le Suédois apporte en point, il l’enlève en plaisir. Vampirisation du jeu, stéréotypé (avec de longs ballons en direction du Suédois) et peu plaisant a regarder pour nous supporters. Rare étaient les personnes conquises par le jeu produit par le collectif Rossonero de 2010 à 2012, une période où beaucoup soulignaient les matchs indigestes, pauvres et peu intéressant a regarder. Bien évidemment, la période « post Ibra » ne fut guère plus réjouissante, avec en plus des résultats sportifs en constante baisse, mais a l’heure ou nous parlons d’un retour au premier plan, le retour du beau jeu sur la pelouse de San Siro serait un des premiers points a corriger. Or, nous pouvons légitimement se poser la question du jeu que nous produirions avec le retour d’Ibrahimovic, et ce au moment même ou les supporters Parisiens commencent a se rendre compte d’un jeu plus plaisant de leur équipe lorsqu’il n’est pas la.
Retour gagnant ou argent gaspillé ?
Rare sont ceux ayant réussi leur « come back » au Milan. Si le retour de Kaka fut contrasté, celui de notre ballon d’or 2004 Andreï Shevchenko fut en revanche un véritable crève cœur pour nous tifosi. Zlatan étant plus proche de la fin que du début, marqué notamment par une dernière saison délicate, il est compréhensible de se demander si ce nouveau retour ne se finira pas, la encore, en déception. Sur le plan physique, le poids de l’âge commencent a se faire sentir et les petits pépins physiques deviennent fréquents.
De fait, mettre autant pour un joueur plus proche de la fin que du début et qui sort d’une saison délicate peut faire émerger en chacun de nous quelques réserves. A l’heure actuelle, si le club cherche a obtenir « gratuitement » le géant Suédois, le salaire proposé sera sans doute important (on parle d’un salaire entre 6 et 7.5M net annuel). Avec une fiscalité Italienne plus stricte que dans d’autres pays (un salaire brut représentant deux fois un salaire net), donner a Zlatan un salaire annuel de 7 Millions représenterait une dépense du club de 14 Millions sur une seule année ! A cela on ajoute la durée de son contrat qui serait de trois ans, la somme pourrait vite devenir conséquente – même avec notre nouvelle situation financière – et, de fait, être un pari risqué.
Toutefois, ces craintes méritent d’être nuancées. Tout d’abord, si l’on peut aisément craindre un retour raté comme nos deux anciennes gloires (nous pouvons également citer le retour raté de Sacchi en 1996), la situation demeure différente. Ibrahimovic sort d’une saison délicate mais reste sur des prestations nettement supérieures a celles de Kaka lors de ces dernières années Madrilènes ou de « Sheva » lors de son passage Londonien. Si le physique a pêché, le niveau du Suédois est resté intéressant et il a tout de même marqué près de 20 buts la saison dernière alors que nos anciennes gloires traînaient leurs crampons sur le banc de leur équipe respective.
Enfin, concernant l’aspect financier, si le salaire aura sans doute un coût important, arriver a obtenir librement le Suédois (et donc a ne pas payer pour l’obtenir) nuancerait clairement la somme dépensée par le club. D’autant que si le Suédois parvient a nous ramener dans les hautes sphères du championnat Italien, cette somme pourrait être très vite rentabilisé (ventes de maillots, vente de place etc).
Wait and see…