Aussi discuté qu’indispensable, l’ex joueur de la Louve a, d’une manière assez incompréhensible, conquis une grande partie de la tifoseria du Milan au point d’être surnommé FenoMénez dans l’Italie d’un football qui court après son lustre d’antan et qui est toujours plus prompt à créer une star là où se cache une simple hype.
Arrivé libre l’été passé en provenance du PSG – tonton Galliani ne s’est d’ailleurs pas privé pour s’en vanter – Jérémy Ménez s’inscrit dans la droite lignée du recrutement d’Adel Taarabt en janvier 2014 : un minimum de talent footballistique accompagné d’une mentalité discutable, ce dont le Milan n’avait pas besoin pour se reconstruire et renaître de ses cendres. Dans cette équipe au niveau très moyen, autant sur le plan technique qu’humain, FenoMénez est né.
Son début de saison avait pourtant de quoi laisser place à de l’indulgence : les performances et les buts s’enchaînaient alors même que certains – moi le premier ! – commençaient à croire que l’enfant terrible avait mis de l’eau dans son vin, notamment grâce à Inzaghi, jeune entraîneur plein d’ambitions et ex-attaquant de renom à même de comprendre le mal du buteur que peut ressentir le numéro 7 rossonero.
Cependant, toutes les belles séries ont une fin, et le Milan n’a pas échappé à la règle en replongeant aussi vite qu’il était apparu sur le devant de la scène. Période qui correspond pile au retour du véritable Jérémy Ménez, celui-là même qui a pourri sa propre carrière par son comportement de gamin qui n’a pas eu son jouet préféré à Noël. Certes, les statistiques sont flamboyantes cette saison : que ça soit sur un poste d’ailier voire en pointe dans un triste rôle de « faux 9 », Ménez a enchaîné les buts, permettant au Milan de vivoter dans le ventre mou du classement de la Serie A.
Il a donc terminé la saison avec 16 buts et 4 passes décisives en 34 matches (dont 32 en tant que titulaire), ce qui fait qu’il a été impliqué dans 20 buts du Milan sur 58 au total. Il est possible de se faire l’avocat du diable en pointant ce nombre important de 8 pénalties que le Français s’est chargé de transformer avec grande réussite : encore faut-il savoir les mettre, ce qui n’est pas forcément un exercice facile à réaliser. Ménez apparaît donc comme indispensable dans ce Milan, où il surnage au sein d’un effectif plus que moyen. Et pourtant…
Au-delà de sa capacité à être transparent 4 matches sur 5, il est loin d’être un joueur utile. En effet, il est indéniable que l’ancien de la Roma est un joueur qui ne sait pas lâcher le ballon : entre balles perdues suite à des dribbles inutiles et mauvais choix de passe, Ménez arrive facilement à provoquer l’ire de ses coéquipiers (en témoignent certaines réactions de Mattia Destro, qui n’aura globalement pas vu souvent le ballon lors de sa courte expérience milanaise).
En outre, qu’attendre d’un joueur qui ne sait pas s’impliquer dans les phases défensives ? A l’inverse totale d’un Keisuke Honda, qui sacrifie une (trop ?) grande partie de son énergie dans un pressing haut et intense, Ménez marche, râle comme tout bon Français qui se respecte, compte les brins d’herbe de toutes les pelouses italiennes, en attendant un ballon exploitable pour s’enfermer à toute vitesse au poteau de corner afin d’y gâcher bêtement une occasion.
A titre de comparaison, l’attaquant français est l’exact opposé de Giacomo Bonaventura, toujours prêt à se sacrifier pour l’équipe en privilégiant le choix intelligent à l’exploit individuel souvent voué à l’échec.
Qui plus est, y a-t-il besoin de s’épancher sur son comportement ? Je me contenterai simplement de citer son attitude suite à son exclusion lors du naufrage à San Siro face au Genoa, qui lui a valu quatre (!) matches de suspension permettant ainsi au Milan de produire une animation offensive plus intéressante durant cette absence.
Ménez est tout bonnement le nouvel exemple même de l’image que l’on se fait d’un joueur da Milan, comme on le dit si bien. A une époque, cette expression se référait à une certaine idée de la technique balle aux pieds, de la classe et de l’élégance sur et en-dehors des terrains (on pense Maldini, Van Basten… la liste est trop longue !).
Dorénavant, être da Milan, c’est être un joueur libre de tout contrat, aux qualités techniques douteuses, au comportement qui l’est tout autant (on pense Balotelli, Mexès, Muntari… là aussi, la liste est malheureusement trop longue). A titre d’exemple, j’espère que vous n’avez pas oublié la magnifique campagne de communication intitulée « A cresta alta » ayant pour objectif de booster les abonnements lors de la saison 2012-2013 avec Balotelli, Niang et El Shaarawy en tête de gondole. Voilà où le Milan en est arrivé, et Ménez en est un symbole, parmi tant d’autres.
Jérémy Ménez réalise tout simplement à 27 ans la meilleure saison de sa carrière d’un point de vue comptable, ce qui s’avère suffisant pour que bon nombre d’amateurs de l’équipe de France crient au scandale de ne pas le voir sélectionné par Didier Deschamps.
L’ancien entraîneur de la Juventus réalise un travail considérable pour former un groupe s’inscrivant dans la continuité, ce qui passe notamment par la mise à l’écart de certaines ‘têtes brûlées’ ou de joueurs n’ayant pas vocation à être appelés dans le futur. Serait-ce simplement lié au hasard si Ménez correspond parfaitement à ce type de joueur non retenu en sélection ?
Le Milan est dans une phase compliquée de son histoire, la plus dure connue par le club selon certains. Pour reconstruire une équipe capable de redorer le glorieux blason du club, de gagner et de retrouver le haut du tableau (en dehors de toute considération sino-thaïlandaise), il faut des joueurs d’avenir, des joueurs ayant des qualités, des joueurs prêts à se sortir les tripes pour porter le maillot du Milan et tout ce qu’il symbolise, et Ménez ne répond pas à la totalité de ces critères.
Seul l’avenir nous le dira mais peut-être que la saison qu’il vient de réaliser était l’arbre qui cache la forêt : si Ménez retrouve par la suite le rendement moyen de ses dernières saisons, acceptera-t-il de se retrouver sur le banc ? Sera-t-il toujours aussi sage, alors même que son comportement laisse déjà à désirer ? Sera-t-il capable de privilégier le bien-être d’une équipe plutôt que son propre petit égo ?
Ces questions apparaissent pourtant comme essentielles, à l’heure où un transfert vers Monaco, qui sera européen la saison prochaine, est évoqué par la presse. Le Milan ne peut pas se permettre de s’appuyer sur des joueurs aussi inconstants et imprévisibles pour bâtir un groupe compétitif et correspondant aux standards historiques de la società.
En définitive, le Milan n’a pas besoin de Jérémy Ménez car il ne saurait constituer un élément du renouveau à venir du club rossonero. Jérémy Ménez n’est autre que l’étendard d’un club en déliquescence, un étendard à mille lieux de ce que devrait normalement être le Milan, un étendard du football moderne où l’on ne forme plus des hommes mais des machines à caprice portées aux nues dès lors qu’elles réussissent quelques belles performances. Pauvre Milan.