Bringuebalé d’un côté à l’autre de l’attaque milanaise depuis un an et demi, Keisuke Honda peut être satisfait de la venue de Sinisa Mihajlovic en compagnie de son 4-3-1-2 fétiche nécessitant la présence d’un trequartista, poste naturel de l’international japonais. Sortant d’une saison plus que moyenne – comme la grande majorité de ses coéquipiers –, le numéro 10 du Milan doit enfin faire ses preuves en Italie. La nouvelle saison qui débute ce dimanche verra-t-elle Keisuke Honda supporter le poids des responsabilités qui incombent à ce poste ?
On ne pourra pas dire que Honda est arrivé dans une période propice à son épanouissement en Italie. Présenté dès sa venue au Milan en janvier 2014 comme un coup marketing dans le but de conquérir l’Asie (ce qui semble surprenant étant donné la faible popularité des Japonais en Asie en dehors de leur archipel), il faut aussi ajouter que le natif de la province de Settsu aura été sous les ordres de Massimiliano Allegri, Clarence Seedorf, Filippo Inzaghi et Sinisa Mihajlovic.
Comme il le disait lui-même à l’époque, il ne partageait pas la même vision du football que Seedorf. Soit. La saison passée, sous les ordres d’Inzaghi, Honda a connu un superbe début d’exercice sur l’aile droite dans un 4-3-3 inadapté (6 buts et 2 passes décisives en 7 matches), avant de s’éteindre complétement malgré la confiance – aveugle, diront certains – que l’ex numéro 9 rossonero lui accordait. Le Milan étant géré comme il l’est depuis maintenant quelques saisons, un nouvel entraîneur pointe le bout de son nez cet été, en la personne de Sinisa Mihajlovic, amenant avec lui un système s’appuyant sur un joueur en soutien aux deux attaquants, poste qui semble donc être l’idéal pour Honda.
Adepte de la méritocratie – les meilleurs joueurs sont alignés pour le match du week-end –, le technicien serbe se doit de se trouver un trequartista. Le choix logique serait donc de confier les clés du jeu au Japonais. Mais ce dernier les mérite-il vraiment ? En effet, bien qu’il soit le seul véritable numéro 10 de formation de l’effectif, on ne peut que constater que Honda n’a jamais fait des étincelles à Milan : sa lenteur et ses mauvais choix de passe ont plus marqué les tifosi que ses trop rares coups d’éclat.
En outre, comme il a déjà été évoqué plus tôt dans l’intersaison (voir ici), la concurrence se fait pressente à ce poste : Giacomo Bonaventura, meilleur joueur de la saison passée, peut prendre cette place, même si cela n’a pas été très concluant en match amical, tout comme Jérémy Ménez, blessé ces derniers temps, ou le volontaire mais brouillon Suso, en attendant peut-être une recrue à ce poste.
Et si le mal était plus profond qu’une simple question de positionnement sur le terrain ? En effet, ses différents entraîneurs comme certains de ses coéquipiers ont à plusieurs reprises salué le professionnalisme et le cœur à l’ouvrage affiché par Honda depuis son arrivée au Milan. En soi, cela ne semble guère surprenant étant donné la place des valeurs de travail et de respect dans la culture nippone. On ne peut qu’être sûr que le Japonais ne s’amusera pas à salir l’image de ce qu’il reste de l’institution Milan comme certains membres de l’effectif l’ont déjà fait par le passé, à l’instar de Philippe Mexès, par exemple. Quel est donc le problème ? De l’extérieur, on peut parfois avoir l’impression que Honda ne s’est jamais réellement intégré dans le collectif milanais.
Souvent à l’écart de ses coéquipiers, rarement expressif sur le terrain pour recadrer ses partenaires, peu présent face aux médias dans les après-matches, le numéro 10 rossonero donne l’impression de traîner sa peine sur les terrains de la Botte. Certains de ses proches se sont fait l’écho de rumeurs laissant entendre qu’il ne se sentait pas chez lui en Italie, de par la langue et la mentalité du pays, ce qui aurait donc directement un impact sur son football.
En effet, on n’a jamais vu au Milan – à quelques exceptions près – le Keisuke Honda qui illuminait le jeu du CSKA Moscou ou de la sélection nationale du Japon. Face à ces supputations, le principal intéressé reste évidemment silencieux et se contente de déclarer que si ses performances ne sont pas bonnes, c’est que le travail qu’il fournit à l’entraînement n’est pas suffisant. Qui plus est, il faut rappeler que le Japonais évolue avec le numéro 10 sur le dos, un numéro symbolique qui attire évidemment les regards et donc les critiques qui vont avec. Pourtant, il semble difficilement compréhensible qu’un homme et qu’un joueur comme Honda soit répudié car portant le numéro 10 alors même qu’un Kevin Prince Boateng, ayant lui aussi (malheureusement) porté ce numéro, compte encore de nombreux partisans dans la tifoseria du Milan.
En définitive, avec un contrat courant jusqu’en 2017, parler de saison de la dernière chance pour Honda n’est pas exagéré : une saison réussie et tout ira bien, une nouvelle saison médiocre et le club n’hésitera pas à s’en séparer un an avant la fin de son bail histoire d’en tirer quelques sous. Cependant, loin de ces considérations, sa vision du jeu et sa qualité de passe doivent lui permettre d’être le titulaire indiscutable au poste de trequartista, afin d’alimenter en ballons exploitables les nouvelles recrues Carlos Bacca et Luiz Adriano.
Amoureux lui aussi du travail bien fait, Sinisa Mihajlovic apparaît comme la seule personne – en dehors du joueur lui-même – à même de tirer le meilleur de Keisuke Honda, au sujet duquel les premières rumeurs de transfert vers l’Angleterre se font entendre.