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Seedorf, symbole du renouveau rossonero

Clarence Seedorf vient de commencer un nouveau chapitre dans sa carrière. On pourrait même parler d’un nouveau livre, dans la mesure ou le poste entrainement est à mille lieux du rôle de joueur. Véritable pari qu’a réalisé la dirigeance rossonera, Seedorf a toutefois l’avantage de très bien connaitre la maison (même si elle a déménagé de la Via Turati, entretemps…) et d’avoir un sens tactique hors pair sur le terrain, ce qui lui a valu le surnom d’ « Il Professore » par les tifosi rossoneri. Revoyons un peu ensemble la longue liste des trophées gagnés par ce grand joueur.

Le petit Clarence voit le jour le 1er avril 1976 à Paramaribo, au Suriname, ancienne colonie hollandaise (la Guyane néerlandaise). Très vite après sa naissance, sa famille émigre aux Pays-Bas où il intégrera le centre de formation de l’Ajax. C’est à l’âge de 15 ans qu’il va connaitre ses premières minutes de jeu en tant que joueur professionnel, lors d’un match de coupe face au VVV Venlo le 28 octobre 1992. Pour ses premières minutes en championnat, il devra encore patienter un peu plus d’un an plus tard, devenant ainsi le plus jeune joueur à évoluer en Eredivisie à l’âge de 16 ans 7 mois et 28 jours. Une très belle carrière de joueur va alors commencer pour lui.

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Une génération dorée va voir le jour à Amsterdam. Le club ajacide voit débarquer dans son équipe première en très peu de temps les frères De Boer, Van der Sar, Reiziger, Bogarde, Davids, Kluivert et donc Seedorf (ci-contre avec le jeune Nigel De Jong). Durant sa période néerlandaise, Seedorf va gagner deux titres de champion (1993-94, 1994-95), une coupe (1992-93), deux supercoupes (1993 et 1994) et surtout, la Ligue des champions en 1995 contre le Milan de Fabio Capello grâce à un but de Kluivert sur un assist de…Rijkaard, revenu entre temps où tout avait commencé pour lui. Les deux équipes s’étaient déjà rencontrées lors de la phase de poules et les néerlandais l’avaient remporté par deux fois sur le score de 2-0. A 19 ans, Seedorf remporte alors la prestigieuse coupe aux grandes oreilles.

Après cette victoire, « Opa » (grand-père) comme on le surnommait aux Pays-Bas pour ses gouts de luxe, décide de quitter son pays d’adoption pour rejoindre le meilleur championnat de l’époque : le Serie A et la Sampdoria plus précisément. Il ne restera qu’une saison en Ligurie avant de rejoindre le Real de Madrid entrainé par un certain Capello. Il devient champion d’Espagne dans la foulée et gagne sa deuxième ligue des champions l’année suivante face à la Juventus de son copain Edgar Davids à Amsterdam. En 1998, il remporte la coupe intercontinentale avec le club madrilène.

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Deux saisons après sa deuxième ligue des champions, il fait son come-back en Italie en rejoignant l’Inter de Milan durant le mercato hivernal. Mal utilisé par les différents entraineurs nerazzurri, son palmarès ne gonflera pas le moins du monde. On le pense même en perte de vitesse après des débuts professionnels très prometteurs. Ne croyant plus en lui, l’Inter le laisse partir au Milan en échange du défenseur italien Coco en 2002 ! A postériori, une erreur monumentale pour les dirigeants nerazzurri, mais alors une décision « logique ».

Seedorf quittera l’AC Milan par la petite porte à la fin de son contrat en 2012 pour rejoindre le club brésilien de Botafogo où il gagnera une coupe Guanabara (coupe de l’état de Rio de Janeiro), et sera ensuite élu ballon d’argent brésilien à son poste en 2013. Son adaptation au football et à la vie au Brésil fut facile pour le batave, lui qui allait chaque année en vacances à Rio et qui a appris le portugais au Real en compagnie de Roberto Carlos mais aussi grâce à sa femme, d’origine brésilienne et supportrice de…Botafogo. Acclamé lors de son arrivée à Rio, il arrive là-bas avec un statut de star et a la responsabilité de guider un effectif composé majoritairement de jeunes joueurs prometteurs (sur un effectif de 31 joueurs, 16 ont maximum 23 ans).

Avant de quitter l’Europe, il a bénéficié du soutien de Fabio Capello dans son choix de rallier le Brésil et pas un club du Golfe ou la Russie. Au pays des Favelas, il va poursuivre son apprentissage dans le coaching et suivra même les cours pour le devenir.

Ce transfert va faire renaitre le phénix de ses cendres : et comme par magie, Seedorf va retrouver son niveau de jeu. Il restera dix ans au club et gagnera 2 scudetti (2003/2004 et 2010/2011), une coupe d’Italie (2002/2003), 2 supercoupes d’Italie (2004 et 2011), 2 ligues des champions (2002/2003 et 2006/2007), 2 supercoupes d’Europe (2003 et 2007) et un mondial des clubs en 2007. Au total, il comptabilisera 432 matches, devienant l’étranger le plus utilisé dans l’histoire du Milan devant le mythique milieu de terrain suédois Nils Liedholm (394 matchs).

Il parvient tout de même à marquer son premier en Oranje lors de sa première sélection à l’occasion d’une victoire 5-0 face au Luxembourg en 1994. Mais il ne gagnera aucun titre majeur en équipe nationale, n’atteignant qu’au maximum deux fois les demi-finales à l’Euro (2000 et 2004) et une fois lors du mondial français. En plus de n’avoir rien gagné pour son pays, son pénalty raté en quarts de finale de l’Euro 96 lors de la séance de tirs au but face à la France et sa non-sélection pour le mondial 2006 en Allemagne resteront deux grandes déceptions pour lui. Il est tout de même rappelé pour disputer les qualifications pour l’Euro 2008 mais à un mois du début de la compétition, il annonce son choix de ne pas participer à cette compétition. On suppose qu’il a renoncé par « solidarité » avec d’autres joueurs expérimentés ayant eux aussi mis de coté la sélection (Van Bommel et Van Nistelrooy notamment), remettant en doute les choix du sélectionneur Van Basten. Clarence Seedorf aura porté 86 fois le maillot Oranje et marqué à 11 reprises.

Le palmarès de Seedorf en ferait baver plus d’un avec 11 trophées nationaux, 6 européens dont 4 ligues des champions gagnés avec trois clubs différents (seul joueur à avoir atteint ce record à l’heure actuelle) et deux supercoupes d’Europe. Il pouvait occuper toutes les places au milieu de terrain mais celle à laquelle il a toujours préféré jouer est celle de trequartista. Cependant, avec des joueurs comme Rui Costa puis Kakà, le néerlandais a du reculer sur l’échiquier rossonero pour jouer la plupart du temps comme mezz’ala. Il dira même que pour le bien de l’équipe, il a accepté sans broncher de jouer à un nouveau poste. Ce milieu de terrain très technique doté d’une très belle vision de jeu et d’une frappe de balle surpuissante mais un peu plus réticent lorsqu’il fallait défendre demeurera un des tout meilleurs a son poste.Néanmoins, Clarence Seedorf n’a pas connu le même succès en sélection nationale qu’en club.

Clarence Seedorf, compétiteur dans l’âme, ne pouvait donc se contenter d’observer le monde du football à distance une fois les crampons raccrochés. Véritable leader dans le vestiaire rossonero du temps d’Ancelotti, puis de Leonardo et enfin d’Allegri, le néerlandais n’a jamais caché son souhait d’embrasser un jour une carrière d’entraîneur, de préférence au Milan, ou Silvio Berlusconi et Adriano Galliani le tiennent en estime. Ces derniers le voient même prendre les rennes du Milan à court terme, surprenant ainsi un microcosme rossonero qui s’attendait à l’arrivée d’un technicien déjà doté d’un CV, à l’image d’un Cesare Prandelli par exemple pour l’après Allegri. Et force est de constater qu’Allegri a justement eu un rôle prépondérant dans la fin de carrière du hollandais, et dans le début de sa nouvelle vie d’entraîneur.

Et, fait étrange à souligner, de tous les joueurs qui étaient sur la pelouse à Vienne pour la finale de la ligue des champions 1995, c’est un adversaire qui aura été le premier à entraîner l’AC Milan. Il a réussi à décrocher la préférence de la direction milanaise par rapport a des personnalités comme Baresi, Costacurta, Boban, Panucci, Maldini, Galli, Albertini voire même Desailly. Il faut dire aussi que de ce match, seuls deux anciens de la maison sont devenus des entraineurs : Rijkaard et Donadoni.

seedorf_12Entretenant de fraîches relations avec Allegri, qu’il a notamment tenu pour responsable de son départ, avant de se rétracter quelques jours plus tard après avoir constaté l’étendue de la polémique crée par sa déclaration (voir ici et ici), ce dernier s’est donc envolé vers le Brésil pour son ultime aventure sportive sous les couleurs de Botafogo. L’avenir de Massimiliano Allegri était donc lié à celui de Clarence Seedorf, ou quand le malheur de l’un est synonyme de bonheur pour l’autre. La débâcle face à Sassuolo, qui a scellé le sort du technicien toscan sur le banc milanais, a marqué la fin de la carrière de l’ex numéro dix rossonero et l’entame d’une nouvelle ère pour ce dernier, marquée par un retour en terre lombarde, qu’il a avoué n’avoir jamais quitté sur le plan sentimental.

Ce choix a donc marqué le retour de la doctrine « Milan ai milanisti » un temps prônée par la dirigeance rossonera. Mais aussi la force de volonté de Silvio Berlusconi, qui a montré qu’il gardait le dernier mot lors des manœuvres stratégiques concernant le Milan. Car l’arrivée de Seedorf est avant tout un souhait de Berlusconi, ce dernier ayant toujours entretenu une relation étroite avec le natif de Paramaribo durant ses dix années sous le maillot milanais. De quoi faire dire au truculent président milanais qu’il voyait bien Seedorf devenir entraîneur lors de son départ à l’été 2012… simple déclaration prémonitoire, ou le signe d’une idée déjà en germe chez Berlusca ?

Véritable pari, l’arrivée de Seedorf signe le retour du Milan vers une philosophie offensive, notamment prônée par Berlusconi. Une philosophie qu’il a tenu à souligner lors de sa prise de fonction, en guise de fil conducteur pour son aventure rossonera. Fin tacticien, le néerlandais marque sa préférence vers les joueurs dotés d’un certain bagage technique, capables de faire la différence à tout moment, et d’offrir un jeu léché sur le plan offensif. D’ou l’instauration du 4-2-3-1, qui fait la part belle aux joueurs offensifs.

Ce qui tranche résolument avec la « philosophie » prônée par Allegri, dont la préférence envers les joueurs athlétiques n’est plus à démentir. Une « philosophie » qui n’a pas eu le succès escompté, qui a en quelque sorte mené le Milan à la position qu’il occupe actuellement en championnat et à la physionomie générale du groupe rossonero, marquée par la présence de davantage de joueurs physiques que techniques. Sans compter un fond de jeu absent, et une ligne directrice que l’on n’a jamais réellement su déceler, notamment dans les déclarations de l’ex entraîneur milanais.

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Des carences sur le plan technico-tactiques à laquelle souhaite remédier Seedorf himself par plusieurs touches successives, dans la mesure ou une arrivée en cours de saison ne permet pas de chambouler un effectif ni de réellement imprimer une philosophie de jeu (ce qui passe par un temps de préparation adéquat, davantage présent lors de la période estivale). Dans l’urgence, il s’agit surtout de colmater les trous, et de distiller, poser les fondations d’une nouvelle organisation tactique. Ce qu’il a expressément indiqué il y’a peu, le beau jeu n’étant pour le moment pas sa priorité (voir ici). Redonner de la joie et de l’enthousiasme à l’effectif, et aux tifosi pour bien clore cette saison : tel est son objectif à l’heure actuelle. Ces cinq premiers mois rimeront davantage avec observation, tractations en coulisses, et préparation de la saison à venir, notamment sur le plan du recrutement.

Cette arrivée, qui rime donc avec pari, pourrait marquer l’avènement d’une nouvelle ère rossonera, marquée par le beau jeu, des objectifs établis sur le plan européen et national, et le retour d’un enthousiasme général. Mais aussi celles des valeurs rossonere, Seedorf ayant été imprégné, marqué par la philosophie de vie à la milanaise, synonyme de respect de l’institution, du blason, des supporters, et de la sobriété en toutes circonstances. Des éléments parfois bafoués sous la direction d’Allegri, ce qui a été souligné à juste titre par les Gattuso ou encore Boban, ex grandes gueules milanaises, mais toujours soucieuses du respect de l’institution rossonera et des traditions. Tout en parvenant à instaurer la distance nécessaire avec des joueurs avec qui l’écart d’age s’avère mince.

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Clarence Seedorf est également attendu sur la question du projet jeunes, dont la mise en place concrète sous la direction d’Allegri a été poussive. Des liens renforcés avec la primavera rossonera dirigée par Pippo Inzaghi sont attendus, afin de véritablement voir émerger de nouvelles jeunes pousses rossonere à l’image des De Sciglio ou encore Cristante. La frilosité dont avait fait preuve Allegri à ce sujet est amenée à disparaître avec Seedorf, car la chance dont il a bénéficié en rejoignant le banc rossonero devrait pouvoir aussi bénéficier aux espoirs milanais, qui n’attendent qu’un signe de confiance à leur égard; Il Mister a donc une carte à jouer pour marquer l’histoire rossonera, tout en composant tant avec les attentes légitimes autour de sa personne qu’avec son apprentissage du rude métier d’entraîneur, et ainsi rejoindre le panthéon des joueurs puis entraîneurs ayant marqué l’histoire de leur club; souhaitons lui donc un destin à la Guardiola plutôt que la balbutiante carrière d’un Luis Enrique…

  • Ibrahimauvais

    Très bon article !

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