L'AC Milan en français sur AC Milan – Zone.fr, communauté francophone sur le Milan AC

Le cas Allegri, ou la mise à l’épreuve de l’inséparable duo Berlusconi-Galliani…

La saison 2013-2014 s’annonce t-elle déjà plombée pour les rossoneri ? 

Le changement c’est maintenant ? C’est le nouvel adage que la direction semble avoir adopté depuis quize jours. « La rebelle attitude » incarnée par Silvio et Adriano histoire de se donner une « tête de banc » liftée ou remodelée : entre Clarence Seedorf, le presque diplômé et Allegri, décrié un jour, béatifié un autre en quête de légitimité. Qui sera le plus en vogue ? Les médias ont spéculé sur le départ de notre entraîneur au sourire « polydent » vers la Roma en dépit de la cause interplanétaire décrétée pour mettre fin à l’hégémonie turinoise.

ACM-Z vous a concocté un dossier qui soulève les problématiques majeures de ces jeux de voltes faces auxquels joue le tandem dirigeant et les conséquences sur la saison à venir.

 

A : De l’intronisation en grande pompe à la lente glissade : Max Allegri, homme de toutes les contradictions.

C’était il y a 3 ans : le coach de Cagliari pose ses valises en Lombardie avec des promesses de renouveau, de bascule vers une stratégie tant désirée par le président d’une équipe portée vers l’offensive toute. Après l’épisode Leonardo accompagné de son lot d’illusions perdues, voici l’incarnation d’un personnage opposé capable de braver les interdits naturels (changement de compos et autre originalités) : Maxou a l’esprit libre. Jamais vainqueur et jamais vaincu, il est toujours convaincu de la voie dans laquelle il s’engage : une assise solide au milieu et une attaque de feu … possible mais pas tout car il peut tout changer d’un coup et s’appuyer sur une seule pointe. Bref plus imprévisible tu meurs ! Quand le club stagne en championnat ou est éliminé en Champions League, il est persuadé que « la force » n’était pas avec les rossoneri et le sort a basculé : en gros un jour ce sera notre tour ! Devant l’adversité, il tient bon et il affirme vouloir garder le cap en tenant bon la barre : oui Allegri est le genre d’homme buté, prêt à s’acharner pour que ses recettes portent leurs fruits.

Il y’a trois semaines, une première rencontre a eu lieu à Via Turati, avec la possibilité d’entrevoir une séparation à l’amiable à la demande de Berlusca. Entrevue d’1 heure 45 minutes avec Adriano Galliani au siège du club. Aucun acte officiel écrit dont on pourrait scruter le contenu. « Il n’y a rien à dire, nous avons seulement bu un café » a déclaré Allegri en sortant. Mais comment le technicien pourrait s’éterniser après la tempête des jours précédents : il avait snobé les journalistes au siège de la Région Lombardie à l’occasion du 50ème anniversaire de la première Coppa Campioni rossonera. Cette éventuelle décision de partir n’est pas la sienne, même s’il a une offre alternative prête depuis des mois, celle de la Roma. Et à défaut de devoir s’expliquer lui-même, il doit le faire avec celui qui le veut encore au Milan plus que tout : Adriano Galliani. Celui-ci n’a pas ajouté grand-chose suite à leur entrevue :  »Le café avec Max s’est bien passé  », a-t-il dit en arrivant.

Sur la table, l’indemnité de départ du technicien à qui il reste encore un an de contrat : on parle d’environ 2,5 millions nets l’équivalent de son salaire saisonnier. Mais il faut définir la forme du divorce : clash ou à l’amiable. Sans compter que la Roma ne peut pas annoncer l’arrivée d’Allegri dimanche en fin de journée, quand elle entrera sur le terrain contre la Lazio lors de la finale de la Coupe d’Italie. Galliani et Allegri se reverront. Cet événement a aussi marqué une divergence de vues entre Berlusconi et Galliani. Mais Barbara Berlusconi tâche de jouer les tampons : « Il y n’a pas aucune divergence entre mon père et Adriano Galliani. L’indemnité de fin de contrat d’Allegri ? Ce ne sont pas des choses qu’ils me préoccupent », a-t-elle déclarée à l’ANSA.

Pendant ce temps, l’agent de Seedorf, Déborah Martin se fend d’une petite déclaration : « En ce qui me concerne, je ne suis pas concerné, ce ne sont que des rumeurs ». Mais en ce moment le Hollandais ne semble pas avoir de rival pour succéder à Allegri. Le footballeur de Botafogo, élu meilleur joueur du championnat Carioca, est en train de passer ses diplômes d’entraîneur. Pour l’instant, il l’a fait à distance avec un cours spécialement conçu pour lui par la Fédération hollandaise et approuvé par l’UEFA, mais pas encore par la commission qui à Nyon est souveraine en matière de formation des entraineurs européens. Et ne cachons pas que l’éventuelle arrivée de Seedorf ne semblait pas rencontrer les faveurs de la tifoseria.

Sur le site de la Curva Sud, un long communiqué avait été publié : « Nous pouvons très bien comprendre, mais ne pas partager le choix des investisseurs qui veulent changer d’entraîneur seulement pour motif personnel, mais si au moins ce projet permettait à l’équipe de repartir dans les mains d’un entraîneur confirmé et certainement pas à des gens comme Seedorf, qui qu’on le veuille ou non ont zéro expérience sur un banc », lisait-on. « Nous soutenons le Milan mais demandons qu’il respecte l’institution et ses supporters, avec des choix cohérents dans la continuation (si ce n’est pas avec Allegri que nous appuyons fermement, au moins avec un vrai entraîneur) car ce projet il y a un an que nous avons décidé de le soutenir envers et contre tous ».

 

 

Bénéficiant du soutien médiatique inattendu de certains joueurs comme Bonera (« En trois ans il a montré qu’il a fait un bon travail »), Max Allegri le paria d’hier a-t-il dégainé une carte décisive dans son bras de fer ? Une parmi plusieurs dont celle des rumeurs relayées par les médias qui l’aident aussi dans les négociations : Sky Italia faisait par d’un vif intérêt de Leonardo, directeur sportif du PSG qui aurait pris contact avec l’entraineur milanais pour le faire venir sur le banc de la capitale. Rappelant ainsi qu’il ne laissait pas indifférent sur la scène internationale !

Maintes fois repoussée, la rencontre au sommet entre Adriano Galliani et Silvio Berlusconi prévue le 30 mai pour remettre le métier sur la table a eu lieu, et a du faire parler une poudre pourtant confuse : Berlusconi semblait partant pour changer de coach (bon ce n’est pas avec Clarence qu’il aurait convaincu le vestiaire !) mais face à Galliani et la tifoseria, le Cavaliere a vacillé.

Il en aura commis des bourdes notre président sur le cas Allegri : dans l’émission d’Aldo Biscardi, ‘Il Processo’ , le présentateur lit un message présumé comme émanant du président du Milan : « J’ai déjà préparé une réorganisation complète des tableaux techniques. Et, s’il en était besoin, d’une réorganisation plus globale du club ».

Le club rossonero a repliqué direct : « Le Président Honoraire Silvio Berlusconi communique ne pas avoir délivré ce type de déclaration ou avoir écrit quelque lettre ayant pour objet le Milan. » Mais le journaliste enfonce le clou : « Quand Berlusconi a vu Lotito il lui a dit: ‘Tu arrives toujours en retard comme ton équipe et moi je te ferai une confidence : je vais donner Allegri à la Roma. »

Il y a encore quelques semaines, le coach milanais qui manie très bien les éléments de langage (ou la langue de bois) n’a rien lâché : « On verra à la fin de la saison » et« J’ai encore un contrat ici ». Mais dimanche soir, il a diné avec Silvio et Adriano et les trois parties ont finalement décidé de poursuivre l’aventure. « Nous avons confiance en lui. Et l’estime est réciproque. Nous avons même parlé du jeu qu’il faudrait développer la saison prochaine », peut-on lire sur le site du club. Allegri est sous contrat jusqu’en juin 2014 pour faire low-cost ou une nouvelle alchimie enfin convaincante ?

B : La direction bicéphale : quand Berlusconi et Galliani se chantent accords….désaccords.

Le plus grand tour de magie du club lombard était sans doute de faire croire qu’à chaque décision prise elle était collégiale : tout va bien dans le meilleur des mondes d’un couple de plus de 30 ans en somme ! Mariage de raison, choix par dépit : on a senti des tensions comme jamais dans le couple exécutif et c’est bien le don du dialogue et du ménagement (associé sans doute à une dose d’intérêt financier) qui a permis a Adriano Galliani de conserver Max Allegri dans les rangs du club. Seul contre tous, Silvio Berlusconi (et sa fille Barbara qui s’est permis quelques intrusions pour venir à son secours avec plus de maladresse qu’avec un plan concret  il faut bien le dire !) était décidé à se débarasser de celui qui représente un boulet loin d’avoir réalisé ses objectifs. Ces deux dernières semaines, la mobilisation interne des joueurs aurait aussi fait pencher la balance : peur d’être perturbé par une nouvelle arrivée ? peur d’être remis en cause ? réelle volonté de soutenir le coach dans son projet ?

On ne le saura sans doute pas, mais loin de faire l’unanimité, l’entraîneur a au moins su sauver sa tête sur un échiquier bien trouble. De l’estime et de l’affection c’est que qui lierait les deux anciens routiers par delà leurs conflits. Dans le bonheur ou dans la douleur, on avait toujours vu les siamois unis comme les doigts de la main. Ce scénario donne l’impression de sortir de l’opacité et du secret pour entrer dans une pseudo transparence : une découverte après un lock-out total de comm’. Les plaies les plus profondes sont apparues aux yeux de tous. Même si fidèle à lui-même, sous le feu des critiques politiques et sportives, Berlu a encaissé les coups sans broncher : dans la perspective de laisser à nouveau la main à son accolyte en cas d’opportunité nationale ? En tout cas, net et sans bavure, il a bien signifié à Max Allegri qu’il ne fallait même plus penser à une autre place que la première (la troisième ça commence à être lourdingue !) : c’est bien la domination qu’il faut rétablir et avec cela l’honneur de sa majesté Silvio dont le prestige a terni autant que les dorures qui ornent les armoiries du club.

C : De la pensée d’un Milan en lutte pour son indépendance.

Dans l’ombre jusqu’à quand ? Retrouver un langage, être moins lâche, plus créateur, revenir aux fondamentaux et retrouver quelque chose de nouveau. Enrichir son jeu et son esprit de corps. Figure de l’Europe perdue, le club lombard doit transmettre à nouveau un message. L’atmosphère doit aussi y être plus respirable pour : il faut charmer, enchanter le public mais aussi rendre des pages éternelles et transcender le football. Hélas le constat qui s’impose malgré ce dénouement attendu pour Max Allegri, c’est celle d’un enlisement, d’une immobilité : c’est dans une véritable prison dorée que se sont enfermés joueurs, entraineur et dirigeance pour tenter de fuir une réalité qui donne le vertige.

Quel raisonnement tirer de cette saison ? Et qu’en tirer pour celle à venir après de telles hésitations d’avant mercato ? Epuisé, sans ressources toujours, le Milan apparaît plus que jamais sans partition écrite et loin d’une résurrection annoncée post-titre de champion 2011. Qui est coupable de cette errance d’un mythe ? « Le Milan prévoit un retour à 2 pointes » dixit Galliani. Et tout ça sous le prétexte du recrutement du jeune Sapanora … out le 4-3-3. L’espace se remplit mais on ne sait toujours pas qui a la main ? Et les propositions sont les mêmes invariablement  : Kaka mais non il ne viendra pas trop vieux et trop cher… Y’a t-il des contraires au sein du sein de la grande maison rossonera ? Il y a en tout cas des petites secousses…

Tout en finesse et en nuance, la dirigeance claudiquante doit aussi espérer que les frais n’augmentent pas (ce qui concernant ceux de bouche serait étonnant !) et pour que la reussite soit au rendez-vous savoir éviter de tomber en panne en cours de route : de blessés en suspendus, on cherche les disponibles et les moins nikelés chez les jeunots pour dépanner. Un peu de dignité messieurs quand on rabiboche on le fait bien ! Tout cela ne sera pas redempteur : le Milan 2013 sent la naphtaline, a de la colle sous les semelles et ne sait comment s’en dépetrer. Compétititrice et jouisseuse, la nouvelle génération devrait avoir tout entre ses mains pour donner le ton …encore lui faut-il « son printemps rossonero », sa reforme de l’intérieure concrétisée sur la pelouse pour s’émanciper du poids d’un passé encore trop présent y compris dans ses rangs. Le témoin doit passer pour que le rassemblement se fasse au lieu d’assister à des lynchages médiatiques d’anciennes gloires qui finissent dans les larmes ou les regrets. Malheureusement, les premiers singaux n’indiquent pas que le temps de panser les blessures soit venu.

 Volontariste et en adéquation avec les réalités du football actuel : voilà la politique que nous sommes en droit d’attendre de la sphère dirigeante. Fini le temps de l’innoncence ou des modérations : au delà de la fidélité à des principes, c’est à un processus d’adaptation de longue halaine auquel il faut se plier, de la base au sommet de la pyramide.

error: