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Gattuso : « Je voyais Ibra dans quatre positions différentes »

Gennaro Gattuso, absent des terrains depuis début septembre et sa blessure contractée à l’œil face à la Lazio, a tenu à faire un point presse à propos de son absence prolongée des terrains. Et c’est au travers d’un long discours que le calabrais est revenu sur les circonstances de sa blessure, avec humilité, et émotion. A l’image du Rino généreux et combatif que l’on suit sur les terrains d’Italie et d’Europe depuis plus de dix ans…

Rudy Tavana commence tout d’abord la conférence de presse, en précisant la nature exacte de la blessure du milieu rossonero :

« Rino a une paralysie du sixième nerf crânien, mais ça n’est pas un « problème de vue ». En soi la résolution du problème a été relativement lente. Après Milan – Lazio nous avons immédiatement demandé les opinions des spécialistes qui pouvaient nous aider pour exclure les formes les plus graves de sa blessure. Exclure les hypothèses les plus importantes a été le début. Nous nous sommes tournés vers des spécialistes, nous sommes restés en contact avec les États-Unis, avec un neurochirurgien de renommée dans tous les Etats-Unis qui parle italien, le professeur Coscarella, qui nous a aidé à avoir des contacts avec Miami. (…). Le pronostic n’est pas totalement sur, il faut attendre deux à six mois pour évaluer l’évolution de cette situation, qui pourrait spontanément redevenir normale. L’injection de botuline lui permet de réduire ces symptômes : Rino en regardant à gauche tend à voir double. Ceci est l’unique thérapie qui nous a été proposée. Comme le staff du Milan ne peut pas prendre ces décisions, nous nous sommes tournés vers des spécialistes »

Place à Rino Gattuso ensuite :

« Je voudrais tout d’abord, me rappeler avec émotion Marco Simoncelli. Sa disparition m’a fait mal. En ce qui me concerne j’ai vu de tout durant ces 45 jours, c’est pour cela que je suis ici. Le docteur Tavana a bien expliqué le problème aujourd’hui, vous étiez préoccupé par rapport à mon retrait des terrains. Il en faut bien d’autres pour m’abattre, il y’a pire dans la vie, regardez hier Simoncelli. Je mène un combat avec un ennemi invisible, l’important est de ne pas lacher et d’aller de l’avant. Je soigne mon œil chaque matin lorsque je me réveille, et pour l’instant je ne pense pas au football, mon quotidien a changé, je suis triste de ne pas amener mes fils à l’école, de ne pas conduire ma voiture, si j’enlève mes lunettes je vois double. Cependant je réussis à travailler mon physique avec régularité, j’ai des charges de travail importantes, et c’est ce qui me donne la force pour ne pas lâcher. Maintenant la chose la plus importante est de redevenir une personne normale au quotidien. Rudy (Tavana) et tout le club sont très proches de moi, lorsque tu subis une résonance magnétique tu penses à tes fils qui sont petits. J’en ai vu de toutes les couleurs, mais lorsque nous avons exclu la présence d’une tumeur j’ai à nouveau respiré.

Ma blessure n’est pas née de ma collision avec Nesta, au contraire c’est la démonstration du problème, Sandro je ne l’ai pas vraiment vu. J’ai à tout prix voulu jouer ce match. J’ai encore quatre mois devant moi, ensuite je pourrais faire une intervention pour rétablir mon œil. Les médecins m’ont toujours rassuré. Avant je voyais triple, maintenant je vois double, il y’a eu une amélioration. J’aurai 34 ans en janvier, toutes ces années passées me font sourire et m’enthousiasment. Lorsque je suis bien physiquement rien ne me dérange, et en tout cas même lorsque je ne joue pas je suis toujours présent dans le vestiaire. Ensuite, certes le football est ma vie, elle m’a donné renommée et richesse, mais je retiens que je suis une personne très chanceuse. Au niveau physique je réussis à tout faire, certes maintenant je ne joue pas, parce qu’en ne voyant pas mes copains ou le ballon je risquerais de faire mal à quelqu’un. J’ai ce problème depuis 45 jours, si tu n’es pas fort mentalement ça devient dur, tu ne peux pas écrire un mail, tu ne peux pas regarder la télévision.

Galliani, Rudy Tavana ont été très proches de moi. Je me sens important dans le vestiaire, après tant d’années je suis un point de référence pour tous mes copains. Ensuite ceux qui me connaissent savent bien de quoi est fait mon caractère, j’ai de l’enthousiasme même lorsque je dors, cela fait partie de ma façon d’être. Si je peux faire quelque chose pour le club, pour mes copains d’équipe, pour tout le monde, je suis là. Je veux le meilleur pour toute la famille Milan.

Le problème s’est manifesté quatre jours avant Milan – Lazio. Je me rappellais qu’il faisait chaud, j’ai appelé le docteur Tavana. Je lui ai dit, Rudy, ça fait deux-trois heures que j’ai une tache quand je vois. Nous devions faire une visite importante le lundi 10 septembre, mais nous n’avons pas pu la faire parce que les vingt minutes face à la Lazio ont été les vingt minutes les plus laides de ma carrière. J’avais l’impression d’être ivre, je voyais Ibrahimovic dans quatre positions différentes. Le choc a été le prétexte pour sortir du terrain. J’ai eu la chance d’être célèbre et d’avoir autant de personnes à disposition, je pense à toutes les personnes qui n’ont pas l’argent pour aller voir un spécialiste. Je pense à ces choses, je pense au fait que je suis chanceux, il y’a des gens qui sont au lit pour des mois et des mois avec le problème que j’ai. Et moi je réussis à faire un travail physique important.

Mes copains ? Pour dédramatiser ils me jouent des tours. Jouer sur mon problème, dédramatiser, a été important. Ça faisait un peu rire de me voir avec les yeux tordus, Cassano s’en est amusé, tout comme Ibrahimovic. L’an passé j’ai fait deux-trois bêtises, après 15 ans de carrière je n’avais pas gâché mon personnage, mais je pouvais éviter ces bêtises là. Cependant lorsque les gens sont au contact avec moi je vois qu’ils ont de l’estime pour moi, qu’ils me veulent du bien. parfois en se trompant, d’autres fois non. Mais je dis toujours les choses en face, et les gens apprécient ça. Être honnête dans ce monde est important. Je repense à Simoncelli, il aimait la vie, il avait toujours le sourire, il était toujours disponible, et c’est pour cela que l’Italie l’a pleuré hier avec un amour incroyable. Je sors d’une très dure bataille, le club me disait de ne pas m’enfermer dans une coquille, j’appelais même Tavana à deux heures du matin.

L’important est que par rapport à moi, et je le pense vraiment, est qu’il y’a des choses bien plus pires que mon cas. La vie continue, les espoirs, je les ai, et je compte en sortir plus fort qu’avant. Il y’a vingt jours nous étions moi, Galliani, et Tavana, et il me disaient qu’il y’avait un risque de ne plus pouvoir jouer. Je l’ai très bien pris, Galliani m’a rapidement dit de ne pas me préoccuper, que l’on a besoin de moi sur d’autres terrains et pour autre chose. Ça a été une très belle chose. J’espère que vous me verrez encore comme footballeur, mais le football restera mon monde, soit comme footballeur, soit dans un autre domaine ».

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