La deuxième phase de la ligue des champions arrive à grand pas. L’occasion pour nous de faire un point avant la réception de l’Atlético Madrid le mercredi 19 février prochain. Parmi les adversaires possibles – Real, Chelsea, PSG, Bayern, Manchester United et Dortmund- l’Atlético semble être l’équipe la plus prenable. Il s’agit uniquement de la théorie, car ce duel devrait s’avérer être plus équilibré qu’il n’y parait, voire même disproportionné mais pas dans le sens que l’on pourrait le croire.
Milan, un des plus grands clubs d’Europe au passé glorieux mais en pleine phase descendante, va devoir en découdre avec un club qui monte en puissance ses dernières années en Liga. Un petit coup d’œil sur le classement serait un bon indicateur des forces en présence : le second du championnat d’Espagne – à égalité de points avec le Real Madrid – se déplace chez le dizième de Serie A. N’ayons pas peur des mots : Milan est l’outsider de cette double confrontation.
Au contraire du Milan, les colchoneros n’ont pas du passer par les play-offs pour disputer la phase de poules de la ligue des champions. Versés dans le groupe G en compagnie du Zenit, de Porto et de l’Austria Vienne, les colchoneros n’ont eu aucun mal à terminer premiers de leur groupe avec un bilan de 5 victoires et un nul (concédé sur le terrain du Zenit). 16 points pris sur les 18 possibles, soit quasiment le double des points qu’à réussi à prendre le Milan (9 points) qualifié par la petite porte pour les huitièmes de finale. Et dire que pendant ce temps-là, Naples a du être reversé en Europa League à cause d’un goal average défavorable malgré leurs quatre victoires en six matches…
Petite parenthèse dans cet article sur la provenance du surnom des joueurs de l’Atlético, ces derniers étant nommés « les colchoneros ». A l’origine, l’Atlético Madrid jouait en bleu et blanc mais en 1911, le bleu est remplacé par le rouge. Pourquoi ce choix ? Pour une question d’argent. A l’époque, tous les matelas avaient les mêmes motifs : blanc à rayures rouges. Le club s’est alors arrangé avec les fabricants de matelas pour récupérer les restes de tissus à bas prix. D’où le surnom de colchoneros : les matelassiers en français. Les joueurs possèdent un deuxième surnom, bien plus évident celui-là : les rojiblancos.
Refermons cette petite parenthèse de culture générale pour reparler de football. Comme déjà évoqué plus haut, l’Atletico est co-leader surprise d’une Liga habituée au sempiternel duel Barça-Real. Le deuxième club de la ville de Madrid arrive à suivre le rythme des deux grosses cylindrées du championnat et pourrait être le premier club à stopper la domination des deux ogres espagnols depuis le sacre de Valence lors de la saison 2003/2004. Seul bémol pour le moment : la défaite 3-0 face à l’ennemi madrilène en demi-finale de la coupe du Roi mercredi passé.
L’Atletico est le club qui monte en Espagne, et ce « renouveau » a débuté par l’arrivée de Quique Flores sur le banc rojiblanco. Si, en championnat, l’Atletico ne termina que neuvième lors de la saison 2009/2010, les madrilènes vont tout de même parvenir à gagner la ligue Europa aux dépends de Fulham, et seront durant la même saison les malheureux finalistes de la coupe du Roi face au FC Seville. Ils priveront l’Inter de Milan d’un magnifique sextuplé en gagnant la Supercoupe d’Europe cette même année.
La saison suivante sonne le glas de Quique Flores qui sera remercié avant la fin de saison et remplacé par Manzano. Une septième place en Liga, une élimination en quarts de la coupe du Roi et un « abandon » de l’Europa Ligue dès la phase de groupes : tel est le bilan de Manzano, qui est contraint de céder sa place à un ancien de la maison, Diego Simeone, qui arrive alors sur le banc de touche en décembre 2011. Après six mois de « peaufinage », l’équipe est fin prête à repartir sur de bonnes bases. Les hommes de Simeone termineront à la troisième place du championnat et remporteront une nouvelle Europa League face à l’Athletic Bilbao, sans oublier la Supercoupe d’Europe après avoir étrillé Chelsea sur le score de 4-1.
Diego Simeone a su imposer son énorme envie et cette rage de vaincre à ses joueurs. Reconnu pour se donner sans compter sur un terrain, il a su créer un véritable collectif où tous les joueurs défendent ensemble dans un 4-4-2 classique (voire 4-4-1-1) avec deux récupérateurs-organisateurs entourés de deux ailiers. Il admet lui-même avoir été fortement influencé par Sven-Göran Eriksson qu’il a eu pour entraîneur lors de son passage à la Lazio : « J’ai eu un grand entraîneur, Eriksson, à la Lazio. Nous avions une grande équipe : Mihajlović derrière, Veron au milieu, Salas, Ravanelli, Mancini, Bokšić… Et Sven-Goran disait toujours : « plus on a de possession, plus on donne du temps à l’adversaire pour se mettre à l’aise. » Et c’est resté dans ma tête. »
On pourrait résumer la ligne directrice de Simeone comme qui suit : faire déjouer son adversaire et les forcer à commettre des erreurs en jouant sur leurs points faibles et en se basant sur un jeu rapide sans négliger la solidité défensive. En clair, l’Atletico va avoir tendance à harceler une équipe qui aime jouer au ballon, à laisser le cuir à une équipe qui préfère attendre son adversaire ou qui a du mal à faire circuler le ballon, presser haut les équipes qui aiment attaquer par les flancs, etc. Le Milan, qui se noie dans une possession de balle stérile, est prévenu…
Si l’équipe ne possède pas (encore ?) de « stars » à l’instar de ses rivaux comme Messi ou Cristiano Ronaldo, l’équipe possède de très bons joueurs comme l’ailier turc Arda Turan, la paire défensive composée du défenseur uruguayen Godin et du brésilien Miranda, cité dans les couloirs de Milanello il y a quelques années, le canterano Koke ou encore l’attaquant David Villa, arrivé pour une bouchée de pain du FC Barcelone l’été dernier. Cependant, les deux joueurs qui font actuellement parler le plus d’eux dans cette équipe sont incontestablement le gardien belge Thibaut Courtois et l’attaquant espagno-brésilien Diego Costa.
Les arrêts extraordinaires de Courtois font en effet le tour de la toile chaque semaine. A seulement 21 ans, il possède déjà un beau palmarès avec un titre de champion de Belgique avec Genk, titre qui lui permettra de rejoindre Chelsea après sa toute première année chez les pros. Il sera alors prêté à l’Atletico pour qu’il puisse grandir… tout comme son palmarès. Chez les rojiblancos, il va gagner une coupe du Roi, une Europa Ligue et une Supercoupe d’Europe. Il est le dernier gagnant du Trofeo Zamora, récompensant le meilleur gardien de but de Liga selon le journal Marca. A 15 reprises, il a su garder ses cages inviolées fois en 27 matches (championnat + Ligue des Champions).
En ce qui concerne Diego Costa, il est dans la lignée des attaquants reconnus mondialement qui font le bonheur de leurs supporters. Digne successeur des Fernando Torres, Kun Aguero, Diego Forlan et Radamel Falcao, Diego Costa est arrivé à l’âge de 19 ans en provenance de Braga. Il connaitra par la suite une multitude de prêts sans réellement exploser. Remplaçant de Falcao l’an dernier, il est aujourd’hui l’un des meilleurs buteurs d’Europe. Il a déjà scoré 20 fois en 23 rencontres de championnat ainsi qu’à quatre reprises buts en 3 matches de C1.
Pour le compte de la 23ème journée, l’Atletico Madrid se déplaçait à Almeria, soit le seizième de la Liga. Les hommes de Simeone se sont fait surprendre en Andalousie et ne sont pas parvenus à ramener le moindre point de leur déplacement, sensé être facile sur le papier. Les deux buts de la partie ont été marqués par Verza (80 et 86ème). Pour ce match, Thibaut Courtois a du déclarer forfait en raison de douleurs au dos et sera remplacé par Aranzubia, qui n’aura pas marqué beaucoup de points avec cette prestation. Une fois n’est pas coutume, Diego Simeone a opté pour un schéma en 4-2-3-1. Sur un corner joué en deux temps, le centre tir de Verza surprend Aranzubia.
On retrouve le même Aranzubia quelques minutes plus tard qui, par manque d’attention, doit retenir l’attaquant adverse qui lui avait volé le ballon dans les pieds suite à une passe en retrait de son défenseur. Double peine pour l’Atletico : expulsion et penalty en faveur d’Almeria. Verza trompe la vigilance de… Gabi qui a pris place dans les buts vu que Simeone avait déjà effectué ses trois changements. Ce n’était vraiment pas la soirée d’Aranzubia (quand on vous disait que Courtois était très important pour l’équipe…). Cette défaite, conjuguée à la victoire du Real 4-2 face à Villareal, permet aux merengues de rejoindre les colchoneros en tête du classement avec 57 points. En cas de victoire de Barcelone face au FC Seville, on aurait trois équipes à égalité de points en tête de la Liga.
L’équipe alignée (4-2-3-1) : Aranzubia ; Juanfran, Miranda, Godin, Manquillo Gaitan ; Gabi, Tiago (Suarez 67ème) ; Turan, Raul Garcia (78ème Lopez), Diego (Sosa 67ème) ; Diego Costa.
On le voit, malgré la perte d’un attaquant comme Radamel Falcao et des problèmes financiers, les résultats sportifs sont en rendez-vous du coté de l’Atletico. A défaut de pouvoir dépenser les 60 millions récoltés de la vente de l’attaquant colombien, le club a su dépenser juste ce qu’il fallait pour rester compétitif : pour remplacer Falcao, ils ont fait confiance à un joueur déjà présent dans l’effectif, et fait venir David Villa pour cinq petit millions d’euros. Le seul véritable investissement fut réalisé pour le milieu de terrain français Josuha Guilavogui, qui est toutefois retourné en prêt dans son club formateur de l’ASSE après seulement six mois passés dans la capitale espagnole. L’Atletico a été actif lors du dernier mercato d’hiver, notamment sur le plan des arrivées : l’argentin Sosa (ex-Bayern et ex-Naples) que Simeone avait dirigé à l’Estudiantes La Plata et le milieu de terrain brésilien Diego, revenu de Wolfsburg (ex – Juventus) sont arrivés dans le cadre d’un prêt avec option d’achat.
Le Milan ne se déplacera donc pas en terre conquise, loin s’en faut. Le prestige rossonero ne saurait à lui seul permettre à Seedorf et ses hommes d’imposer leur emprise sur cette double confrontation, face à une formation madrilène rodée et actuellement en bonne forme. Les matchs de Ligue des Champions demeurent cependant à part; à défaut de fond de jeu établi, une solidarité hors pair pourrait peut-être permettre aux rossoneri de faire la différence…