En ce 5 juillet, le groupe milanais entraîné par Vincenzo Montella retrouve le chemin de l’entraînement collectif pour la première fois de la saison 2017-2018. En coulisse, la direction rossonera s’active toujours pour renforcer ce groupe mais aussi pour le délester de ses indésirables. Dans une longue interview accordée au Corriere della Sera réalisée hier et parue aujourd’hui, l’administrateur délégué Marco Fassone fait le point sur le mercato et annonce aussi les objectifs pour la nouvelle saison, première de l’ère Rossoneri Sport Investment.
Commençons par Gigio. L’accord est-il proche ?
« J’avais prévu que les portes du Milan resteraient ouvertes si Gigio avait voulu repenser à sa décision. Cela a été le cas : j’ai la sensation que nous sommes proches d’un accord avec le joueur et sa famille, à la condition que nous ne fassions pas d’autres compromis. Je pense que nous sommes à un jour ou deux de la décision, qui revient au joueur. »
A quoi faites-vous référence quand vous parlez de compromis ?
« Ces décisions ne sont jamais prises par les joueurs seuls. Il y a aussi les agents. Dans ce cas, il y en a un très doué qui a ses idées et ses convictions mais qui diffèrent des nôtres. Dès lors, je ne sais pas quelle sera la décision finale. »
Mais avez-vous eu l’impression que la famille et Raiola aient eu des visions différentes ?
« Non. Jusqu’à ce qu’on me dise le contraire, mon interlocuteur est Mino Raiola, avec lequel je parle plusieurs fois par jour. Je répète : je crois que nous nous sommes entendus sur la partie de l’accord qui concerne le joueur et la famille, l’autre partie avec l’agent est plus compliquée. »
Cette autre partie, que comprend-elle ? Le problème réside-t-il dans la clause libératoire ?
« Le domaine est vaste. Cela comporte une rétribution, des avantages, des clauses, des commissions, des possibles clauses sur une future vente du joueur… »
Vous avez évoqué un délai de deux jours : ensuite, le Milan cherchera-t-il un nouveau gardien ?
« C’était une estimation, je ne donne plus d’ultimatum. »
N’avez-vous jamais eu envie d’interrompre les négociations ?
« Je pense que j’ai appris à gérer les situations de ce genre non pas avec les tripes mais avec la raison. Deux raisonnements m’ont guidé. Gigio est un des meilleurs gardiens du monde : le faire partir à la fin de la saison aurait été un dommage économique important. C’est pourquoi j’ai choisi d’aller de l’avant, étant entendu qu’une certaine limite à ne pas dépasser se posait. »
Les précédents propriétaires du club pouvaient-ils faire plus ?
« Je n’en ai aucune idée. J’ai trouvé deux joueurs importants en fin de contrat en 2018 (Donnarumma et De Sciglio, ndlr). J’imagine qu’avant le mois d’avril, des tentatives ont été faites pour les prolonger. »
Avez-vous parlé avec Gigio du fait qu’il ne passe pas ses examens ?
« Honnêtement, j’étais certain qu’il allait les faire. »
Les agents ont-ils trop de pouvoir ?
« Les clubs sont aussi un peu responsables. Si un club n’est pas structuré, un bon agent peut influencer les choix du mercato. Au contraire, si un club a une politique claire, l’agente rend un service utile et si la commission n’est pas énorme, tout va bien. Le problème, c’est lorsque les commissions sont trop hautes… Les clubs cèdent alors que personne ne nous oblige à accepter. »
Quel président est Yonghong Li ?
« Il est très différent de ceux auxquels nous sommes habitués. Il sera nettement moins visible. Ce n’est pas un entrepreneur avec une seule entreprise, c’est un investisseur qui a des actifs importants et très diversifiés. Il voyage beaucoup et est basé dans différents villes en Chine. Il a une équipe de travail qui le suit. Son bras droit est Han Li, dont j’ai des nouvelles tous les jours. Monsieur Li, au contraire, je ne l’entends qu’une fois par mois. Il est convaincu que le Milan peut l’aider pour ses affaires dans son pays : c’est l’équipe la plus aimée en Chine. »
Que vous a-t-il dit la première fois ?
« C’était le 5 août, il était hôte à la Villa Certosa (domaine sarde où Berlusconi séjourne régulièrement, ndlr). Il m’avait déjà choisi sans même me rencontrer. En 10 minutes, il m’a expliqué sa vision, il m’a dit qu’il connaît peu le football mais qu’il est bon pour les affaires. Il m’a demandé si je pouvais lui garantir que le Milan retourne en Champions League en peu de temps et il m’a dit que j’aurai son soutien. »
Si le Milan n’atteint pas la Champions League, avec les revenus qu’elle engendre, tout tombe à l’eau ?
« Certainement pas. Mon travail est de faire en sorte que l’investissement ne soit pas gâché par un objectif sportif qui n’est pas atteint. Notre plan est soigné, il prévoit aussi la possibilité de prendre plus de temps. Si la Champions League venait à manquer deux années de suite, j’aurais quelques sujets de réflexion en plus. »
Les six recrutements ont créé beaucoup d’enthousiasme. Le Milan est-il déjà l’anti-Juve ?
« Je n’ose pas compter les points d’écart que nous avons pris ces dernières années. J’aimerais qu’en deux mois nous colmations cet écart mais nous savons que la première année est toujours pleine de difficultés. »
Alors, qui sera l’anti-Juve ?
« Le Napoli. L’équipe ne s’est pas affaiblie, elle est rodée et elle a un jeu intéressant. »
On entend souvent que le Milan a été acheté avec une dette trop importante.
« Le Milan que j’ai trouvé avait 75 millions d’euros de dette que nous avons transféré aux banques du fonds d’investissement Eliott, avec des intérêts à 7,7%. Ensuite, nous avons émis des obligations de 50M€ pour faire face aux exigences du mercato estival. En tout, il y a 120M€ d’endettement sur plus de 200M€ de chiffre d’affaire : c’est extrêmement contenu par rapport à d’autres clubs. Au vu des investissements faits, la saison 2017-2018 aura encore des pertes significatives et Monsieur Li y fera face avec une augmentation de capital. »
En vérité, les doutes concernent plus la nouvelle propriété que le Milan.
« L’acquisition du Milan a coûté plus d’un milliard d’euros. Penser que cela a été fait sans garantie financière me semble difficile. Monsieur Li a du changer son programme en cours de route suite à la nouvelle législation chinoise. »
Avez-vous toujours été convaincu de conserver Vincenzo Montella ?
« Oui. Pour nous, il est très doué. Mirabelli me faisait remarquer que l’on voyait sa façon de faire du point de vue technique. Moi, j’ai noté qu’il avait tenu la barre durant une phase de transition où la direction a changé pour la première fois en trente ans. »
Combien avez-vous dépensé jusqu’à présent sur le mercato ? Combien pouvez-vous encore dépenser ?
« Je dirais environ 100M€. Maintenant, j’espère pouvoir prendre un autre joueur, puis nous nous arrêterons et nous penserons aux départs. Un effectif trop important n’aide pas l’entraîneur. Ensuite, nous verrons ce qui restera dans le budget. »
Les tifosi veulent un regista et un autre attaquant. On parle de Biglia, Kalinić et le rêve, Belotti.
« Nous aimerions faire d’autres opérations mais elles ne doivent pas être forcées. Biglia est en attente. Kalinić, nous laissons la Fiorentina tranquille. Et nous avons déjà beaucoup d’attaquants. »
Avez-vous des nouvelles de Berlusconi ?
« Souvent, il me donne beaucoup de conseils. »
Pour conclure : quel Milan avez-vous trouvé ?
« Ces dernières années, il a eu du mal. Mais le Milan a un ADN de grand club. Il est comme une voiture très puissante qui est restée au garage à prendre la poussière et qui a envie de reprendre la compétition. »