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Faim de contrats

La gestion actuelle de l’effectif milanais et du club en général, et l’abîme dans laquelle est plongée le Milan cette saison nous invite à passer en revue l’une des aberrations administratives du club : le recrutement de joueurs en fin de contrat. Cette tendance à contacter et faire signer le moindre joueur en fin de contrat est apparue au Milan bien avant ce marasme présentément traversé par le Milan. Évoquons notamment l’arrivée du milieu de terrain français, Mathieu Flamini en 2008, arrivé d’Arsenal pour zéro euro. Au nez et à la barbe du raisonnable Arsène Wenger. C’est donc « l’affaire du siècle ». Cependant, en prenant du recul, aujourd’hui il est clairement possible d’affirmer que l’arrivée de Flamini au Milan ne constitue pas l’affaire du siècle, bien au contraire. Car le joueur a longtemps pataugé sans jamais justifier le fameux statut de la très bonne affaire qui l’a suivi après son départ d’Angleterre.

Mais ce transfert inabouti à paramètre zéro n’est qu’une seule et unique démarche parmi tant d’autres. Une stratégie de transfert pouvant être perspicace et efficace, mais très mal exploitée au Milan en ce moment. Et cela n’est pas prêt de changer puisque le club rossonero et ses dirigeants ne semblent pas tirer des conclusions de leurs nombreuses erreurs. Aujourd’hui, le Milan est en difficulté, plongé dans une crise profonde, mais une crise qui semble évitable à bien des égards. En cette période de transferts, l’analyse de la stratégie milanaise sur le marché du football s’impose, surtout que cette dernière n’est pas vraiment payante et se révèle dispendieuse.

Une étude plus exhaustive du cas Flamini permet de mettre en valeur ce manque de discernement, de perspicacité et d’intelligence de la direction milanaise. Mathieu Flamini débarque au Milan le 5 mai 2008. Il était alors en Angleterre, à Arsenal, après des débuts à Marseille, son club d’enfance. Libre de tout contrat à l’époque, il décide de signer au Milan en 2008 un contrat qui le lie au club rossonero pour quatre ans avec à la clé un salaire des plus juteux. En effet, les dirigeants milanais lui proposent un salaire de 4,5 millions d’euros sur 4 ans. Une offre que Flamini n’hésite pas à accepter puisqu’il devient un joueur du Milan à part entière, délaissant ainsi sans circonspection son ancien club d’Arsenal. Jeune et fougueux, il arrivait au Milan avec le statut de joueur en devenir et potentiellement remplaçant du guerrier Gattuso. Néanmoins, le milieu de terrain français déçoit au Milan. Rares sont les matchs où l’ancien Gunner s’est révélé précieux et satisfaisant pour son équipe. Et les saisons se suivent et se ressemblent pour Flamini : aucun véritable match de référence, des prestations médiocres. Sa place au Milan est sur le banc, malgré une concurrence assez faible pour son poste.
De plus, une facette de son jeu assez compromettante pour lui se révèle aussi. Un jeu violent, et une fâcheuse tendance à tacler rudement et sans ménagement pour l’adversaire et en Italie, ça ne pardonne pas. En somme, son style de jeu ne semble pas convenir au championnat italien mais plutôt au championnat anglais. Une observation que pouvait facilement faire le club milanais avant de s’attacher les services de Flamini. Cependant, le Milan n’a pas agi de cette manière et a préféré embaucher le joueur sans le juger a posteriori. Et aujourd’hui, les résultats sont édifiants. Le joueur n’a pas réussi au Milan, un échec somme toute plus ou moins probable que les dirigeants milanais ont négligé. La sentence est quant à elle lourde pour le Milan. Un simple calcul permet de dévoiler les pertes consécutives à ce transfert infructueux. De grosses pertes pécuniaires pour le Milan, car entre le salaire, et les primes du joueur français, le club rossonero a dû débourser plus de 18 millions d’euros sur 4 ans, durée du premier contrat de Flamini. Une somme conséquente qui pouvait néanmoins être économisée si le Milan s’était montré plus lucide. Entre-temps, le départ du joueur était difficile à envisager, car tout d’abord aucun club ne se montrait vraiment intéressé par le joueur qui a déçu, et le joueur lui-même n’avait pas la volonté de quitter le Milan qui lui assurait un salaire confortable. Une erreur évitable à 18 millions d’euros, soit presque le prix du transfert d’Ibrahimovic au Paris Saint-Germain. Mine de rien, ce n’est pas rien. Mais comme dit la maxime latine : errare humanum est. Pardonnons donc cet impair aux dirigeants milanais et allons de l’avant. Tirer des conclusions de ses bévues et ne plus les réitérer. Dorénavant, il faut prospecter avant de recruter.

Toutefois, les dirigeants milanais ne l’entendent pas de cette oreille et étonnamment, les erreurs de même nature se multiplient. Outre Flamini, il est aussi possible de citer les noms des joueurs suivant arrivés à faible coût : Emanuelson, Mesbah, Taiwo et plus récemment l’ancien nancéien Traoré, sans oublier les inconnus et inutiles Adiyiah, Montelongo, Cardacio et Viudez. Tous ces joueurs sont ou ont été des joueurs du Milan mais ne se sont jamais vraiment imposés au sein du club. Ce qui au début semblait être un pari selon les dirigeants milanais tourne logiquement et sans surprise au fiasco car déjà dans leurs anciens clubs respectifs, ces joueurs n’avaient pas une renommée importante ni un talent confirmé. Pourquoi donc chercher à les recruter, surtout que des joueurs comme Emanuelson, Mesbah ou Taiwo ont longtemps endigué les jeunes prometteurs de la Primavera milanaise. Sur le plan financier, ces opérations se révèlent bien plus coûteuses que prévues, car entre les primes, les salaires et autres dépenses liées aux joueurs, la facture grimpe rapidement. De surcroît, ces joueurs signent des contrats à longue durée qui les lient au Milan. De fait, un éventuel départ est difficilement possible. Taiwo par exemple, a été prêté mais n’a toujours pas quitté définitivement le Milan, Mesbah a refusé de quitter le Milan l’été passé. De ce fait le club a toujours une responsabilité vis-à-vis de ces joueurs et éprouve des difficultés à s’en séparer.

Globalement, ces transferts incompréhensibles n’ont aucun intérêt et sont en fin de compte préjudiciables pour le club et ses finances. Dans une moindre mesure, il est aussi possible d’ajouter à cette liste le nom de Mexès. Le défenseur français est lui aussi arrivé au Milan pour zéro euro en signant un contrat lui assurant un salaire de 4 millions d’euros par an. Pour l’instant son bilan au Milan est plus ou moins mitigé. Sa première saison est à oublier, car il n’a presque pas joué, et fut décevant lorsque il était sur le terrain. Sa deuxième saison reste elle aussi mi-figue mi-raisin. Il a certes profité du départ de Nesta et Thiago Silva pour gagner une place de titulaire, mais la défense milanaise reste instable et les statistiques le démontrent : le Milan est la neuvième défense d’Italie avec 26 buts encaissés cette saison. Son salaire exorbitant n’est de ce fait pas grandement justifié. Ainsi, ces nombreuses affaires aux faibles rendements constituent une véritable perte pour le club. Une après l’autre, ces opérations entraînent des dépenses, qui cumulées représentent un coût élevé et évitable pour le club.

Doit-on pour autant proscrire cette stratégie low-cost ? Pas forcément, car actuellement le Milan ne peut se permettre de gros transferts à prix élevés et s’attacher les services d’un joueur au talent confirmé. Engager à paramètre zéro peut donc être une solution à envisager. Cependant, il est nécessaire d’avoir un projet étudié autour de cette stratégie. Analyser les caractéristiques du joueur ciblé avant de le faire signer, engager un dialogue pour l’attirer, et proposer un contrat raisonnable qui correspond au statut et talent du joueur. Recruter intelligemment et ne pas acheter pour acheter, et se concentrer sur les secteurs de jeu qui nécessitent des renforts. Ce sont ces petites démarches importantes qui pourraient changer la donne et dissuader le club de recruter un flop comme ce fut déjà le cas ou encore encourager le club à enrôler un joueur prometteur. Une bonne affaire n’arrive pas au moment opportun, elle est le résultat d’un travail et d’une chasse efficace et réfléchie. C’est pour cela qu’en adoptant cette stratégie de mercato, les dirigeants milanais ne doivent pas se reposer sur leurs lauriers mais chercher à améliorer ou à perfectionner leur stratégie.

L’arrivée de Montolivo est notamment l’exemple un recrutement très judicieux à paramètre zéro. En effet, le milieu de terrain italien avait déjà avant son arrivée une très bonne réputation en Italie : joueur technique et bon meneur de jeu. Des qualités qu’il n’a pas tardé à montrer sous le maillot rossonero. Il s’est rapidement imposé au sein de l’entrejeu milanais et est devenu l’une des satisfactions du début de saison milanais. Montolivo a même porté occasionnellement le brassard de capitaine, preuve de son début de saison réussi. Il fait déjà l’unanimité et cet aboutissement n’est pas le fruit du hasard car à la Fiorentina, Montolivo brillait autant. Outre l’aspect purement sportif, l’arrivée de Montolivo est le signe d’un transfert à paramètre zéro réussi. En effet, le Milan a fait preuve de lucidité avant d’embaucher l’ancien florentin.

D’abord en engageant très tôt le dialogue avec son entourage pour séduire le joueur et lui présenter le club. Ensuite, en écartant la concurrence grâce à la mise en avant de la force du Milan et de son prestige. Enfin en s’assurant la présence du joueur au Milan grâce l’authentification du contrat qui le lie au club. Une liste d’étapes donc accomplie par les dirigeants milanais, qui a abouti à l’arrivée de Montolivo au Milan. Aujourd’hui, son bilan sous les couleurs rossonere est flatteur et ce transfert judicieux et réussi est le fruit d’un travail efficace et non pas du hasard de l’oisiveté. De même, De Jong arrivé cet été au Milan peut être considéré comme un transfert réfléchi car ses premiers mois avec le Milan ont été satisfaisants. Ce début d’aventure positif a cependant été mis à  mal par une grave blessure.

Comment être performant sur le terrain sans beaucoup dépenser ? C’est la question qui tourmente les dirigeants milanais par les temps qui courent.  Car actuellement, le Milan ne dépense presque plus. Recruter à paramètre zéro est devenu une opération si répandue au point que l’on commence à se demander si le club n’a pas un appétit de contrats, une faim de contrats. Plusieurs arrivées, quelques fois absurdes, au Milan à paramètre zéro n’ont logiquement pas abouti et se sont en fin de compte révélés coûteuses pour un club qui tente de lésiner sur les moyens. Néanmoins, cette stratégie n’est pas inappropriée et pourrait être efficiente avec un peu de sagacité : avoir du flair et flairer les bonnes affaires.

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